“Une vie privée de fantasmes au lieu d’une vie privée fantasmatique : une vie de psychotique.” J.-C. R.

Elle était tranquillement en train de bercer sa fille de 6 mois dans ses bras frêles et chaleureux, de jouer avec, de profiter au maximum d’elle quand bien même elles étaient en week-end, lorsque retentit la sonnette de la porte d’entrée. Habitant un duplex, elle n’eut pas le temps de descendre que la porte s’ouvrit. Si Lucile avait été en bas, jamais elle ne l’aurait ouverte. Mais la personne qui voulait pénétrer son intimité n’était autre que la « nouvelle camarade de jeux » de son ex-conjoint. Afin de montrer « pattes blanches », elle se fit passer pour l’une de ses collègues de travail. Comme si elle savait ce que voulait dire travailler ! « De Vautrin Lud qui plus est » … Désolée « ma belle » (ceci n’étant qu’une expression bien sûr), mais Lucile était professeur de Lettres Modernes au Lycée Jules Ferry ! Cela s’appelle une usurpation d’identité afin de pénétrer de force chez des individus ! A noter pour plus tard, passer à la gendarmerie afin que ce genre d’intrusion ne se renouvelle plus !

Sans aucune gêne apparente pour ses parents qui assistaient impuissants à ce spectacle affligeant, « celle qui ne se présenta pas » mais que l’on va appeler Pr., se mit à crier, à vociférer, à s’égosiller, à beugler tel un animal en rûte que Lucile ne respectait pas sa vie privée. Nous y voilà. Mais, enfin, Pr., t’es-tu décolorée les cheveux aujourd’hui ? Ou est-ce cette floraison de boutons qui envaillissaient ta (j’allais dire « jolie », mais non) frimousse qui t’empêchent de respirer normalement ? Tu t’introduis chez elle sous de faux prétextes, téléphone en main (telle une ado), pestant, déblatérant toutes tes conneries  (sans même avoir pensé à te brosser les dents avant ! : un minimum de respect pour les autres s’il te plaît…). Il semblerait que Lucile s’initie dans sa vie privée. Or, retournement de situation, Pr. lui montre une photographie qui, selon elle, apparaît sur le Facebook de Lucile. Mais , enfin , Pr., toi et ton jules êtes bloqués sur son Facebook. Qui viole la vie privée de qui au juste ?

Alors que Lucile lui proposa de s’asseoir et de prendre une petite camomille (par intraveineuse s’il vous plaît), celle-ci eut l’audace de lui demander qui était le bébé qui apparaissait sur son profil ? Laissez-la halluciner. Vous, êtes les voyeurs; vous, êtes les mateurs; vous, êtes les observateurs ! Si elle avait désiré que sa fille ait pour père un homme qui passe sa vie à faire avorter ses copines, au secours, ce serait fait. Mais sa fille ne serait pas née. D’où la situation ubuesque dans laquelle Lucile était ce dimanche soir-là. Elle fit passer sa fille pour sa filleule. Obligée de la protéger de ces lucifériens ronchonneurs.

Cela faisait presque un an qu’elle n’avait pas revu P. Et, très franchement, elle se demanda ce qu’elle lui avait vraiment trouvé pour perdre en sa compagnie trois années de sa vie. Il  n’a pu décrocher deux mots. On voyait clairement qui portait la culotte dans le couple. 

Elle avait bien réfléchi à ce que Pr. l’écervelée lui avait dit ce jour-là, à propos de son écriture; et puis elle a eu un flash. Après elle s’est paisiblement endormi, et depuis elle n’a jamais plus pensé à elle et à ses allégations démunies d’intérêts. Savez-vous ce qu’elle a compris ? Pr. n’est qu’une gosse. Elle parle sans avoir la moindre idée de ce dont elle parle. Elle n’est jamais sortie de La Croix-Aux-Mines ! Sauf pour poser un cadenas sur le pont des amoureux à Paris. Cadenas : loquet, verrou, serrure, pêne, antivol, targette ! Toute sa vie quoi !

Aussi, Pr., sache que le sommeil fait partie de la vie privée, donc s’il t’arrivait de rêver de Lucile, ne va pas immédiatement chez les flics ! Dire que l’on se moque du droit à la vie privée parce que l’on n’a rien à cacher, ça revient à dire que l’on se fiche de la liberté d’expression, parce que l’on n’a rien à dire. Or, Lucile, des choses à dire, elle en a et elle en aura toujours.