De la banalisation de la diffamation !
« La diffamation. Une idée excellente. Le banal assassinat ne tue qu’une fois, mais la diffamation tous les jours »(Terry Pratchett). Vous avez une idée aujourd’hui, une meilleure idée demain, mais la meilleure de toute… jamais ! Suivez ainsi votre idée. Votre idée fixe, et ne vous plaignez pas de ne pas avancer. Les vers luisants brillent la nuit pour que les oiseaux de proie les voient et les mangent, de même les braves gens existent pour que les cancans et la calomnie aient quelque chose à dévorer. Sachez tous que le clabaudage est un propos en l’air qui aura pris du poids en retombant dans une oreille malveillante. Maintenant que l’intérêt privé et que la finalité de l’Etat « trouvent l’un dans l’autre leur satisfaction » (Hegel) s’achèvent sous nos yeux -pour qui sait les ouvrir- le retournement historique de l’autogestion dans une forme sociale qui est la calomnie : l’égogestion généralisée. On parle de voix populaire. Mais qu’est-ce que la voix populaire ? Une voix en l’air, une voix de l’air : elle apporte la calomnie, la diffamation, la lâche vengeance… Un bruit, un court, et qui assourdit les têtes faibles, permettez-moi de vous le dire… En outre, les lâches qui calomnient oseraient-ils l’attaquer en face ? Quelque grossier qu’un mensonges puissent être, ne craignez rien, calomniez toujours ! Quand l’accusé confondrait toujours vos discours, la plaie est faite ; et, quoiqu’il en guérisse, on en verra toujours du moins la cicatrice. Car, malheureusement, l’envie reçoit toujours plus volontiers les impressions de l’attaque, de la flétrissure que celles de la vérité.
Je suis indignée par le procédé, indignée par le mensonge, indignée par l’outrance… Il doit y avoir des limites à la calomnie… Aujourd’hui on rapporte une histoire abracadabrantesque… Ce qui est malheureux est que la malveillance est le ver solitaire de la société, on n’arrive jamais à lui voir la tête. Tout ce qui nous arrive est aussi ordinaire et aussi prévu que la rose au printemps, ou la moisson en été. Telles sont aussi pour nous la maladie, la mort, la calomnie qui nous déchire, l’inimitié qui nous tend des pièges, et tant d’autres événements, qui sont pour les ignorants des sujets de joie ou d’affliction. L’injure, la simple insulte, est une attaque sommaire, sans indication de motifs. Il est de fait que celui qui injurie n’a rien de réel ni de vrai à produire contres les autres, sans quoi il l’énoncerait comme prémisses et abonnerait tranquillement, à ceux qui l’écoutent, le soin de tirer la conclusion; mais au contraire, il donne la conclusion et omet de fournir les prémisses. Mais les mots ne tuent que ceux qui l’enrichissent de leur fausseté, préférant aux agréments de l’authenticité et de la candeur la hiérarchie des faux-semblants où la parole donnée à une parole marchandée et la relation prétendument humaine un chantage permanent. Rendre leur crédit aux mots en les rendant à la vie enseigne que les accusations tombent d’elle-mêmes, déjouant le piège où se prirent Othello et Lago, par contemption de l’amour. De toute manière, que vous soyez aussi chaste que la glace ou aussi pure que la neige, vous n’échapperiez pas à la calomnie.
Mentir pour son avantage à soi-même est imposture, mentir pour l’avantage d’autrui est fraude; mentir pour nuire est calomnie; c’est la pire espèce de mensonge. Mentir sans profit ni préjudice de soi ni d’autrui n’est pas mentir: ce n’est pas un mensonge, c’est fiction. La calomnie est comme les guêpes qui vous importune, et contre lesquelles il ne faut faire aucun mouvement, à moins qu’on ne soit sûr de la tuer, sans quoi elles reviennent à la charge plus furieuses que jamais. Et oui, la vertu agit et la calomnie l’épie, et attend l’événement: s’il est malheureux, elle empoisonne jusqu’aux intentions de l’objet de sa haine.
Alors, soyez sur vos gardes ! Car, peu importe que cela soit vrai ou faux. L’essentiel, c’est la calomnie. Les gens aiment le scandale.
Commentaires récents